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Peut-on produire un smartphone écoresponsable ?
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Il nous sert de réveil, d’appareil photo, d’agenda, à rester en contact avec nos proches ou à nous divertir. Depuis sa première commercialisation par IBM en 1994 le smartphone est devenu l’objet connecté le plus répandu dans le monde avec 6,64 milliards d’utilisateurs. C’est aussi une technologie qui évolue rapidement. On en change d’ailleurs tous les 21 mois en moyenne. Or la fabrication d’un smartphone engendre des impacts environnementaux et sociaux importants, liés notamment à l’extraction des minerais qui le composent. Alors comment faire pour continuer à les utiliser sans culpabiliser ? Produire un smartphone écoresponsable, c’est possible ?
Anatomie d’un smartphone
Quand on y regarde de plus près, on découvre qu’un smartphone est composé de plus de 70 matériaux différents, dont une cinquantaine de métaux. Parmi eux, on trouve du cuivre, du zinc, de l’aluminium et de l’étain, mais aussi des métaux précieux, comme l’or et l’argent ainsi que des terres rares dont la disponibilité n’est pas infinie.
“La fabrication des smartphones requiert des ressources naturelles. Nous, entreprises et consommateurs, avons oublié à quel point ces ressources sont précieuses et rares, notamment à cause de la très courte durée de vie de nos appareils”.
Bien souvent, l’extraction même de ces minerais pose problème. Entre épuisement des ressources, destruction des écosystèmes, pollution des eaux, de l’air et des sols, l’exploitation minière a en effet de lourdes conséquences sur l’environnement. Elle génère également des conflits d’usage, comme en Bolivie, en Argentine et en Chine où l’utilisation massive d’eau pour produire du lithium compromet la survie des populations locales. Sans parler des conditions de travail dans les mines, où selon l’UNICEF plus de 40 000 enfants sont exploités pour extraire le cobalt entrant dans la composition des batteries de téléphone. "L'extraction de ces matériaux, souvent réalisée dans des conditions de travail terribles et parfois par des enfants, a de très lourdes conséquences sur le plan social.”, résume Ioiana Luncheon.
Un constat qui s’alourdit d’autant plus quand on considère que la transformation de ces matières premières, la fabrication des composants électroniques, l’assemblage et l’utilisation même des smartphones pèsent aussi dans la balance. Alors que faire ? Faut-il bannir les smartphones de nos vies et renouer avec l’art de la correspondance épistolaire pour limiter nos impacts ?
A la recherche du smartphone durable
En réalité, des alternatives existent. C’est le cas du Fairphone, un modèle de téléphone durable, réparable et équitable lancé en 2013 par la société néerlandaise éponyme. Soucieuse de réduire l’impact écologique et social du secteur, ses modèles sont fabriqués avec des matériaux issus de filières éthiques, des pièces en grande partie remplaçables et facilement démontables pour prolonger leur durée de vie.
Il est donc possible d’optimiser l’ensemble de la chaîne de production. Toutefois, il ne faut pas non plus voir dans cette initiative une solution miracle : “la notion même de durabilité varie d’une personne à l’autre, ce qui contribue, entre autres, à rendre impossible la production d’un smartphone totalement durable et responsable. Mais on peut tout à fait faire mieux que l’existant!“, ajoute Ioiana Luncheon.
Sans compter que, du côté des consommateurs, il existe également des leviers pour rendre notre rapport aux smartphones plus vertueux.
Sortir du smartphone jetable
Face à l’attrait de la nouveauté, soutenu par l’innovation technologique et le design, les consommateurs peuvent tout d’abord choisir d’offrir une seconde vie à des modèles d’occasion. Le succès de plateformes de vente en ligne comme Back Market, qui a vu la vente de smartphones reconditionnés augmenter de 10% en France en 2020, prouve d’ailleurs qu’il existe bel et bien une place pour ce marché.
Un autre levier consiste à privilégier des modèles facilement réparables afin de prolonger la durée de vie des smartphones. L’initiative “10 Year Smartphone“ s’inscrit dans cette dynamique, en insistant auprès de la Commission européenne sur le droit à la réparation en faveur de produits plus durables.
Enfin, les vieux modèles ou smartphones usagés peuvent tout simplement être recyclés. Or ils le sont encore insuffisamment : “Pour l’instant, l’apport en matériaux recyclés ne suffit pas à couvrir les besoins de toute l’industrie. Nous avons encore besoin de matériaux vierges”, précise Ioiana Luncheon.
En tout, 1,4 milliard de smartphones sont vendus chaque année à travers le monde mais seulement 15 % des smartphones usagés sont recyclés.
S’il n’existe donc pas de smartphone 100 % écoresponsable, les externalités négatives liées à sa production et à son utilisation peuvent être bel et bien réduites, pour s’approcher au plus près de ce modèle idéal.