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Rencontre avec Kalima et Sylvain, réalisateurs de la web-série Foodorama
4 min
L’alimentation est à l’origine de plus d'un tiers des émissions globales de gaz à effet de serre imputables aux activités humaines, d'après une étude pionnière menée conjointement par la FAO (l’Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture) et la Commission européenne. Alertés par ce constat, Kalima Hammond et Sylvain Leurent, deux professionnels de l’image, entament une aventure hors du commun : en 2018, ils parcourent plus de 20 000 kilomètres à vélo entre le Canada et le Pérou “à la recherche des solutions pour l’alimentation de demain”. Le résultat est visible sur la plateforme France.tv sous la forme de 6 épisodes documentaires de 8 à 9 minutes.
Comment vous est venue l’idée un peu folle de cette série documentaire ?
Sylvain Leurent - Nous avions envie de faire un grand voyage et nous travaillions tous les deux dans l’audiovisuel (Kalima est chargée de production et d’administration et Sylvain est photographe-vidéaste). Nous avions envie de monter un projet, et étant tous deux sensibles à l’environnement et à notre alimentation, nous avons eu l’idée d’aller à la rencontre d’acteurs impliqués dans l’alimentation durable et d’en faire une mini-série documentaire. Ces petits films de 8 minutes permettent peut-être de toucher plus de monde, notamment des jeunes initialement non sensibilisés à l’alimentation durable, car c’est plus vivant, plus simple d’être pris dans le sujet.Kalima Hammond - Nous n’étions pas du tout cyclistes à la base, l’idée du vélo est venue après, quand nous nous sommes renseignés sur la meilleure façon de voyager. Nous avons choisi le vélo couché car il est plus confortable, et il attire l’attention, ce qui était un gros atout pour nouer le contact avec les gens que nous croisions sur la route. L’idée était aussi de jouer sur le côté aventure pour toucher les gens.
19 mois de voyage, 38 interviews réalisées, 17 initiatives locales pour l’alimentation durable filmées… Comment êtes-vous parvenus concrètement à relever le double défi du voyage à vélo et de la réalisation d’un documentaire?
SL - Tous les sites spécialisés sur ce type d’aventure expliquent comment voyager le plus léger possible. Nous, on avait pas moins de 10 kilos de matériel audiovisuel avec nous - dont un petit appareil photo hybride et un drone pour la vidéo - ce qui n’est pas rien, surtout dans les cols à 4 000 mètres d’altitude ! On avait aussi tout le matériel pour dormir en autonomie. Et les vélos couchés eux-mêmes pesaient plus de 20 kilos ! Sans compter qu’il fallait en parallèle du voyage mener la recherche documentaire pour continuer d’identifier des interlocuteurs sur la route, recharger nos batteries, écrire les épisodes, contacter les gens…
Quelles sont les initiatives qui vous ont le plus marqués, et pourquoi ?
KH - Le maire de San Pedro, au Guatemala, fait partie des personnes qui nous ont énormément inspirées. Il a interdit le plastique à usage unique dans sa ville. Elle est située au bord du lac Atitlan, qui est magnifique, mais extrêmement pollué par le plastique. Il a dû se battre pour cela, et a même fait face à un procès des industriels du secteur ! Finalement, il a réussi, le projet fonctionne bien, les habitants jouent le jeu, et cela a attiré pas mal de touristes! Depuis, beaucoup de communes autour du lac ont suivi et une usine de tri des déchets a été créée, alors qu’avant il n’y avait rien.
SL - Nous avons aussi été très marqués par Claudia, une jeune mexicaine, qui a vécu dans le Chiapas au sein d’un mouvement zapatiste, et qui a décidé de retourner sur la terre de ses ancêtres, près de Mexico, pour devenir maraîchère. Elle a repris une chinampa, un de ces îlots artificiels sur l’eau sur lesquels, notamment les aztèques, cultivaient de quoi se nourrir, et qui sont aujourd’hui menacés. A présent, elle y fait pousser des légumes en agro-écologie. Son engagement très sincère donne envie de faire la même chose.
KH - La Zenger Farm, aux Etats-Unis, est aussi un lieu qui nous a marqués. Cette ferme urbaine développe un programme de santé en collaboration avec des cliniques. Concrètement, les médecins peuvent rédiger des ordonnances à leurs patients pour des légumes, et cela leur donne accès à une bourse qui leur permet de financer un abonnement à l’Amap (Association pour le maintien d'une agriculture paysanne).
Et pour la suite ?
KH - Début 2020, nous étions en Nouvelle-Zélande, pour continuer le projet. Le Covid nous a contraints à tout stopper et à rentrer en France. Depuis, nous avons eu un enfant, et nous aimerions encore agrandir notre famille. Mais nous prévoyons de continuer le projet dans quelques années, quand nous pourrons amener toute la famille en voyage. Ce sera surement avec un autre moyen de transport pour faciliter les choses. Et pourquoi pas sur un autre thème !