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Teindre nos vêtements avec des végétaux pour dépolluer la mode
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Les teintures utilisées sur nos vêtements souillent l’eau et la terre de manière quasi permanente et font de la mode une industrie très polluante. Heureusement, des alternatives existent. Dans le sud de la Chine, une technique traditionnelle et séculaire permet de teindre les vêtements naturellement grâce à un jus de légume !
La production de textile demande une importante quantité d’eau et générerait chaque année 1,2 milliard de tonnes de gaz à effet de serre. Ajoutons à cela, les rejets de produits chimiques qui viennent abîmer les ressources hydriques. Selon, l’ADEME, agence française de l’environnement, “20% de la pollution des eaux dans le monde serait imputable à la teinture et au traitement des textiles”. Pour porter nos vêtements déclinés en une combinaison infinie de couleurs, les industriels utilisent des produits particulièrement polluants et dangereux, pour la Terre mais aussi pour la santé des travailleurs.
Les teintures classiques sont composées de métaux lourds, de colorants azoïques ou encore de formaldéhyde. Enfin, avant d’être définitivement teint, le textile est le plus souvent blanchi à l'eau de javel. Les composants chimiques se retrouvent ainsi dans nos vêtements et dans nos cours d’eau. En Indonésie par exemple, les usines textiles déversent leurs eaux usées dans le Citarum, le fleuve le plus pollué du monde. Cette eau est une ressource indispensable pour les populations qui l'utilisent pour leur consommation et pour l’agriculture.
Une solution inattendue : un colorant à base de végétaux
Des alternatives existent notamment en matière de teinture pour alléger le bilan écologique de notre garde-robe. Dans un premier temps, on peut opter pour la couleur naturelle du coton avec des vêtements non-teints ou alors choisir des matières teintes naturellement à base de plantes.
“Ce que vous choisissez de mettre sur votre corps est important et a un impact. Nous choisissons de porter des vêtements et cela reflète la façon dont nous nous percevons et aussi la façon dont les autres nous perçoivent”
Cette entrepreneure américaine d’origine chinoise a créé une marque responsable de vêtements à partir de la soie “xiang yun sha”, une soie naturellement teintée est fabriquée selon les techniques ancestrales, dans le sud de la Chine.
Pour teindre ses vêtements, Kelly Shanahan utilise une variété d’igname chinois. Ce légume, qui se rapproche de la patate douce, est très riche en tanins. Après avoir appliqué le jus de légumes pour obtenir la couleur attendue, la soie est séchée au soleil avant d’être recouverte de boue (récoltée directement dans la Rivière des Perles), très riche en fer. Elle est ensuite rincée dans l’eau de la rivière. Comme l’explique Kelly Shanahan, La combinaison du fer et du tanin permet de créer “une réaction chimique, qui change la composition de la fibre”. “Ce beau processus de fabrication a été fait de la même manière pendant 500 ans dans cette partie de la Chine”, ajoute-t-elle.
Les solutions anti-pollution se trouvent parfois dans les plus vieilles traditions
Le procédé (de l’application de la teinture jusqu’au rinçage) peut être répété jusqu’à trente fois en fonction de la couleur souhaitée. Contrairement à un procédé de fabrication industrielle à base de teinture chimique, les résultats peuvent parfois varier et la production dépend aussi des contraintes de l’environnement. “Il y a beaucoup de facteurs qu’on ne contrôle pas directement, ce qui peut créer des frustrations parfois. Toutefois, c’est aussi libérateur parce que vous ne pouvez pas faire grand-chose et Mère Nature prend le relais, confie Kelly Shanahan. C’est vraiment inspirant et amusant de travailler de cette manière.”
Pour corriger nos techniques industrielles et préserver l’environnement, il n’est pas toujours nécessaire de chercher très loin ou de mettre en œuvre des solutions technologiques complexes. Les solutions sont, parfois, déjà connues de l’humanité depuis des siècles. Le procédé de teinture naturelle qu’utilise Kelly Shanahan est profondément lié aux traditions chinoises :
“Quand les artisans fabriquent la soie, ils pensent aux principes taoïstes et à l'harmonie avec le ciel et la terre. Tout ceci fait vraiment partie de notre culture”
Il ne fait aucun doute que la mode toute entière gagnerait à appliquer cette technique pour alléger son impact environnemental.
Aux marques qui pourraient s’y intéresser, Kelly Shanahan ne ferme pas la porte et se dit prête à faire office d’intermédiaire, si tant est que la démarche est sérieuse et qu’il ne s'agit pas simplement d’une opération marketing.