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24h dans une station d'épuration des eaux usées
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Eau du robinet, de la douche ou du bain, des toilettes, du lave-vaisselle… Toutes ces eaux usées que nous produisons au quotidien ne peuvent pas être relâchées dans la nature. Elles sont en effet très polluées et nocives pour l’environnement et les humains ! Le traitement des eaux usées est ainsi un enjeu majeur de santé publique. Selon les estimations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le manque d'assainissement de l’eau est à l'origine de près de 432 000 décès chaque année. Les eaux usées doivent donc être traitées avant d’être rejetées dans la nature. Pour comprendre comment cela marche, direction Avignon, dans le sud-est de la France, dans une usine de traitement de l’eau.
La station d'épuration de Courtine, gérée par l’entreprise Veolia, traite les eaux usées - des maisons, de quelques industriels et les eaux de pluie de certains quartiers anciens (intra-muros) - des communes du Grand Avignon, soit 180 000 habitants, et quelque 29 millions de mètres cubes par an d'eau. Prenons un exemple : Mr Dupond, qui habite dans le charmant centre-ville fortifié d’Avignon, fait la petite commission aux toilettes. Il tire la chasse. L’eau ainsi éliminée débute son grand voyage jusqu’à la station d’épuration, grâce au réseau de tuyauterie qui achemine les eaux usées de l’agglomération vers la station de Courtine, à une poignée de kilomètres de là. Dans 24h, elle sera rejetée dans le Rhône, propre !
L’eau de la chasse d’eau des toilettes de Mr Dupond commence son périple de nettoyage dans la salle de prétraitement.
“Dans ce bassin, des grilles permettent d’enlever les feuilles, les papiers, les bouts de plastique, etc”.
“Certains éléments comme les lingettes sont un gros problème, car elles bouchent les systèmes, ce qui produit une chaîne de dysfonctionnements, il ne faut donc surtout pas les jeter dans les toilettes mais à la poubelle”, prévient-il.
Les graisses qui stagnent à la surface sont raclées et traitées à part, et les déchets plus lourds comme le sable tombent au fond, où ils sont aspirés. Ce dernier est récupéré pour être recyclé. “Dans une optique de tri optimal, il faut aussi éviter de jeter les huiles de friture par exemple aux toilettes ou dans l’évier, car elles bouchent tout”, souligne Reynald de Guili, le responsable du site, en refermant la porte.
Quelques heures plus tard, l’eau usée ainsi débarrassée de ses plus gros déchets emprunte de gros tuyaux pour se diriger vers l’un des quatre bassins biologiques de la station. Chacun d’entre eux peut contenir 22 millions de litres, l’équivalent de neuf piscines olympiques !
La station “fonctionne comme la nature, en accéléré” sourie Reynald de Guili. De fait, l’installation s’inspire du fonctionnement naturel d’une rivière, car celle-ci a normalement un pouvoir auto-épurateur des déchets biologiques. “C’est ici que se fait le gros du traitement”, explique-t-il, en pointant du doigt la surface du bassin. L’eau arrive d’abord dans la zone d’aération, qui fait tout le pourtour du bassin, et qui est alimentée en oxygène. Cette opération permet d’accélérer le travail des bactéries qui “mangent” les composés organiques.
Puis, elle est transvasée dans la zone située au centre du bassin, appelée “clarificateur” - 5 mètres de profondeur, 45 mètres de diamètre - “on y fait décanter les boues, qui tombent naturellement au fond et qu’on récupère pour les recycler en compost ou pour alimenter notre nouveau méthaniseur qui les transforme en gaz, tandis que l’eau propre se maintient en surface”, explique Léon Thao, exploitant. Puis l’eau, désormais plus propre, est rejetée dans le milieu naturel.
“C’est l’Europe qui dicte les règles générales, mais en dessous, le niveau de traitement dépend du milieu récepteur - fleuve, mer, rivière fragile, etc”.
La station d’Avignon est une station d’épuration biologique (STEP), pour traiter des déchets biologiques. Mais il existe aussi des stations qui utilisent des traitements physico-chimiques, plus adaptés dans le cas d’effluents industriels majeurs. En cas de rejets dans un milieu sensible, comme des eaux de baignade par exemple, on peut également faire un troisième traitement (désinfection) dans une structure adaptée. Pour suivre l’évolution de la “propreté” de l’eau, des échantillons sont régulièrement analysés en laboratoire.
Celui de la station d’épuration de Courtine est installé à l’étage du bâtiment administratif. “Au total, nous réalisons 156 contrôles analytiques par an, ce qui permet, entre autres, de contrôler la pollution qui entre et la propreté de l’eau qui sort, c’est-à-dire si elle respecte les normes en vigueur”, détaille Reynald de Guili. La station d’épuration de Courtine travaille d’ailleurs en collaboration avec les collectivités locales pour identifier les secteurs qui sont susceptibles d’émettre des pollutions non biodégradables comme les désherbants, de l’hydrocarbure ou autre pollution et pouvoir retrouver la source.
Une fois toutes ces étapes passées, l’eau est considérée comme “propre”. Elle est relâchée en contrebas, dans le fleuve : le Rhône, où elle retrouve poissons et flore aquatique, jusqu’à la mer.