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« La vidéo est un vecteur d’inspiration »
4 min
Le festival de films Megacities ShortDocs propose aux réalisateurs et réalisatrices du monde entier de mettre en lumière les initiatives et les défis sociaux et environnementaux de leurs communautés locales.
A l’occasion de la septième édition du festival, nous avons demandé à son cofondateur et président Didier Bonnet d’évoquer l’avenir du festival – et sa vision du film documentaire en tant que vecteur de changement.
Vous appelez les documentaristes à l’action en leur disant : « prenez votre caméra, mettez en lumière les défis et les initiatives des plus grandes villes du monde ». Pourquoi se concentrer sur l’espace urbain ?
Didier Bonnet : Quand je travaillais dans la télécommunication, j’allais souvent à Londres, Paris, New York et Tokyo. Je me suis rendu compte que les grandes villes mobilisaient leur culture et leur histoire pour rendre le monde meilleur, de mille et une façons. Notons par ailleurs que ces villes accueillent des centaines de milliers de nouveaux habitants chaque jour ; notre planète est de plus en plus urbaine, et il est parfois beaucoup plus difficile de surmonter un défi lorsqu’on habite dans une grande ville que lorsqu’on habite dans un village.
Nous avons donc pris deux décisions d’entrée : nous avons choisi de privilégier les films consacrés aux villes, et les films axés sur les solutions. En d’autres termes, nous voulions que le produit fini permette de partager des exemples édifiants, capables de motiver le spectateur, de lui permettre d’imiter et d’adapter ces solutions à sa propre ville. Dès le début, nous avons voulu adopter une approche positive, nous voulions être inspirés par des initiatives constructives – impossible de gagner un prix au festival en se contentant de filmer les bouchons sur les routes d’une grande ville par exemple. Il faut mettre en lumière une solution potentielle. Après six éditions, nous avons déterminé qu’il était parfois nécessaire de montrer des situations négatives et inacceptables, mais il ne faut pas se contenter de dénoncer une situation et de filmer sa réalité locale ; les documentaires courts doivent également nous donner à voir les enjeux de la situation – et idéalement une façon de rendre le monde meilleur.
Pourquoi avez-vous choisi le film documentaire pour promouvoir le changement environnemental ?
D.B. : Par définition, les documentaristes s’intéressent à la vie et aux défis sociaux. Et lorsqu’un documentaire est bien réalisé, il est au croisement du militantisme et de la culture, il défend une cause juste. Il est plus facile d’amener les gens à soutenir une cause avec de belles images et une bonne musique, un bon contenu chargé d’émotions. Pour moi, la vidéo est un vecteur d’inspiration plus direct que la lecture. La vidéo a plus de chances de faire passer le message, d’amener les gens à se porter volontaires, et peut-être même à créer leurs propres initiatives. Les films sont également de bons outils de promotion pour les ONG. Lorsqu’un documentaire se concentre sur le travail d’une ONG, il lui apporte de nouveaux membres, de nouveaux sponsors, il renforce son impact.
Pourquoi tenez-vous tant à voir les gens s’exprimer, influencer leurs semblables ?
D.B. : J’ai constaté que les gens aiment rendre le monde meilleur en filmant des documentaires. Ils sont souvent interpellés par certains aspects de la réalité qui les entoure, et ils en font un film. Ils s’inspirent de leurs valeurs, filment ce qu’ils veulent partager avec le monde, et nous leur donnons une plateforme pour diffuser ce qui leur tient à cœur. Nous tenons à ce que les ShortDocs soient consacrés à des exemples concrets : il ne doit pas s’agir d’idées en l’air, mais de réelles solutions mises en œuvre par de véritables personnes.
Pouvez-vous nous parler d’un documentaire court qui vous a particulièrement marqué ?
D.B. : « The Planter », qui raconte l’histoire de Hélio Da Silva. Dans la zone est de São Paulo, les parcs municipaux n’étaient une priorité pour personne, à l’exception de Hélio, qui avait bien l’intention de créer quelque chose de beau. Il a commencé à planter des arbres en 2003, d’abord 200 plants, puis 400, puis 5 000. A l’époque où nous avons projeté le documentaire, il en avait planté plus de 20 000 ! Plusieurs années après le début de son initiative, la municipalité a enfin fini par remarquer le potentiel qu’il n’avait jamais cessé de voir ; elle a installé des toilettes publiques et des équipements sportifs, entre autres commodités. Le réchauffement climatique n’épargne pas la ville de São Paulo ; heureusement, les arbres de Hélio font baisser la température du parc (inférieure de 4 à 5 degrés à celle de la rue attenante !). Ce film a été le grand vainqueur de la troisième édition du festival, en 2007. Il met un problème en lumière, et raconte l’histoire édifiante de l’homme qui est parvenu à trouver sa propre solution.